Projet de Loi de Finance 2025 : RENOUER AVEC LA SOLIDARITÉ DÉMOCRATIQUE
Communiqué du 14 novembre 2024
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Pour faire face à la règle des 3% de déficit public imposée arbitrairement par l’Union Européenne, le Projet de Loi de Finances 2025 prévoit 40 Milliards d’économies pour seulement 20 Milliards de nouvelles recettes. Un coup dur pour les personnes qui vivent en situation précaire alors que le plan d’austérité imposé aux collectivités locales constitue un second coup de rabot pour les acteurs de la solidarité que sont les associations.
La France est la 7ème puissance économique mondiale. Pourtant plus de 5 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. Personnes en recherche d’un emploi et travailleurs précaires, familles monoparentales ou couples avec de bas revenus, personnes en situation de handicap, retraité.es … ils et elles ne disposent pas du minimum pour vivre, se nourrir, se loger, s’habiller et élever dignement leurs enfants. 50 % des personnes aidées par le Secours Catholique vivent avec moins de 500€. Les jeunes de moins de 25 ans, non éligibles au RSA, sont de plus en plus nombreux à solliciter l’aide alimentaire.
D’autres profitent largement des largesses d’un État néolibéral. Les 500 plus grandes fortunes de France cumulent 1.170 milliards d’euros (+168 milliards en 2023), soit l’équivalent de 45% du Produit Intérieur Brut. Elles imposent un chantage immoral : davantage taxées, elles n’investiraient plus en France. Ainsi les fonds de pension et autres « investisseurs » exercent une pression constante sur les choix économiques, allant jusqu’à ouvrir au marché financier lucratif les secteurs clés de la solidarité que sont la petite enfance, le vieillissement, l’insertion, le réemploi… abusant pour cela du statut d’entrepreneur « social » et de la manne des investissements à impact.
Le PLF 2025 ne prévoit pas de compenser ces inégalités. Au contraire, en réduisant de 40 milliards les financements publics, il s’en prend au tissu social indispensable à la vie en société. Et la menace du 49.3 risque de rendre vain le débat parlementaire qui refuse cette logique de baisse de la dépense sociale. Le seul amendement Zucman, proposant un impôt de seulement 2 % sur la tranche des patrimoines supérieurs à 1 milliard d’euros, rapporterait 13 milliards d’euros au budget de l’État. Une paille pour ces grandes fortunes, un symbole pour une fiscalité juste.
Les associations citoyennes appellent à relever les défis de la transition écologique.
France Nature Environnement estime à 10% de crédits en moins les fonds pour la mission Écologie. Ainsi l’ADEME perd près de 500 millions, MaPrimRenov’ 1 milliard. Pour le Fonds Vert en soutien aux investissements écologiques des collectivités locales c’est 1,5 milliard de perte de crédits. Et au contraire ce sont 3 milliards de taxation supplémentaire sur l’électricité qui sont attendus, faisant porter sur les budgets des familles la charge de nouvelles recettes tout en augmentant leur précarité énergétique… Le PLF n’est pas à la hauteur des enjeux pour lutter contre le dérèglement climatique. Pire, pour le Réseau Action Climat « tous les financements de la transition écologique sont en périls ».
Les associations citoyennes appellent à relever les défis de la justice sociale.
Le projet du gouvernement prévoit une baisse de 90 millions d’euros des crédits alloués à la politique de la Ville, qui s’ajoutent aux plus de 5 milliards de baisse de la dotation aux collectivités locales. Celles-ci jouent un rôle essentiel dans la cohésion sociale et les politiques de solidarité. Elles s’appuient sur les acteurs associatifs qui risquent de voir les financements locaux baisser lourdement.
Le PLF met en place l’avis de la Cour des comptes qui envisage 100 000 suppressions de postes dans la fonction publique en 5 ans. Pourtant, la mise à mal des services publics multiplie les difficultés des familles liées aux injustices sociales, elle réduit l’accès aux droits des personnes les plus précaires, elle aggrave les inégalités territoriales. Le risque est grand de voir les personnes se replier de plus en plus sur elles-mêmes, alimentant le rejet de l’espace politique.
L’Union des Employeurs de l’Économie Sociale et Solidaire (UDES) alerte sur les conséquences dramatiques du projet de loi de Finances qui pourrait menacer « jusqu’à 186 000 emplois, remettant en cause la pérennité des services essentiels fournis par le secteur à des millions de citoyens ». ESS France dénonce un budget inconscient pour l’ESS, avec une baisse de -25% pour l’action « Économie sociale, solidaire et responsable ». Pire, le Mouvement pour l’Économie Solidaire (MES) s’indigne d’un amendement porté par le Rassemblement national qui demande la suppression pure et simple du programme de soutien à l’ESS, pour le plus grand plaisir des tenants du tout marché lucratif.
La politique de soutien à l’emploi se trouve aussi fortement impactée, avec notamment une réduction de 42 % des crédits de soutien aux contrats aidés, ou des crédits insuffisants par exemple pour pérenniser l’expérimentation dans les Territoires Zéro Chômeurs de Longue Durée, et des craintes sur les aides à l’apprentissage alors que le taux de chômage des jeunes atteint 17,7 % au deuxième trimestre 2024.
La politique de solidarité internationale se voit raboter de 20% son budget alors que le rayonnement international de la France est en péril. Coordination Sud dénonce cette baisse de l’Aide Publique au Développement « La France peut réaffirmer qu’elle est une nation qui mise sur la coopération entre les peuples et non un état qui piétine les valeurs de solidarité et d’humanité ». Plutôt que de regarder du côté des groupes industriels qui saccagent la nature et les ressources locales, ce sont les ONG et les associations qui agissent au plus près des habitants qui vont se trouver dans l’incapacité à mener leurs actions de solidarité s’inscrivant pourtant dans la lutte contre les inégalités mondiales telle que définit par la loi de programmation d’août 2021.
Au-delà du PLF et du PLFSS, les acteurs associatifs appellent à rester vigilant au regard de nombreuses politiques publiques garantes d’un État démocratique et aujourd’hui menacées. C’est le cas notamment des risques pesant sur l’audiovisuel public, comme sur le soutien aux radios associatives et à une presse indépendante. Les atteintes aux Libertés associatives se multiplient, le droit des associations à exercer leur liberté d’expression et de critique comme garant du débat démocratique est menacé. Au nom d’un imaginaire devoir de neutralité, les associations se voient confisquer leur droit d’intervention dans le débat public, notamment lorsqu’il s’agit de défendre les intérêts des personnes avec qui elles agissent au quotidien.
Ces exemples sont significatifs des orientations gouvernementales. La logique suivie par le PLF 2025 continue de détricoter l’État social, et l’espace public seul garant de plus de solidarité démocratique. Les débats et les amendements votés lors du débat parlementaire montrent qu’une autre voie est possible.
Deux orientations s’affrontent, la première laissant la main aux acteurs d’un marché lucratif, la seconde cherchant à réparer les maux de ce système en s’attaquant à ses racines. Le Collectif des Associations Citoyennes appelle à renouer avec la solidarité démocratique.
Pour le Collectif des Associations Citoyennes
Gilles Rouby – Président
Ressources
- Espace où nous avons compilé les différents textes et éléments d’analyse
- La déclaration commune d’Oxfam, 350.org et ATTAC « Pour un PLF populaire et démocratique »
- Lettre ouverte du Mouvement Associatif (LMA) aux sénateurs & sénatrices « ALERTE SUR LE FINANCEMENT DES ASSOCIATIONS«