Propositions : Mesures législatives et réglementaires nationales proposées par le collectif
Quelles mesures législatives et réglementaires seraient nécessaires pour sécuriser le travail des associations et répondre aux difficultés de ces dernières années ?
Reconnaître la contribution des associations à l’intérêt général et à la vie sociale
Pour que les associations puissent jouer leur rôle au service de l’intérêt général, une redéfinition de ce rôle et des modalités de financement des associations est nécessaire, en articulant la réglementation française à la réglementation européenne. Aujourd’hui, une incohérence majeure doit être levée : l’Europe ne reconnaît les subventions au-delà d’un certain seuil que si l’association est mandatée pour une mission de service public. La réglementation française suppose l’initiative de l’action revienne à l’association. L’incertitude juridique ainsi créée conduit les collectivités à multiplier les appels d’offres et à faire basculer artificiellement de nombreuses actions dans le champ concurrentiel.
Articuler la réglementation française et la réglementation européenne
Il convient de revenir sur l’assimilation de toutes les associations à des entreprises, car dans la réalité la majorité des associations ne relèvent pas de la réglementation des aides d’État[1] :
– 80 % d’entre elles (1,1 sur 1,3 millions)[2] ne sont pas employeurs et leur activité repose uniquement sur le travail bénévole de leurs membres.
– parmi les 165 000 associations employant du personnel, on peut estimer à 35 000 le nombre de celles qui dépassent le seuil de 500 000 euros d’aides publiques sur 3 ans[3], et donc à 130 000 celles qui se situent en dessous des seuils a minimis pour les SIEG.
– parmi ces associations employeuses, certaines peuvent recevoir plus de 500 000 euros d’aides publiques sur 3 ans sans vendre des biens ou des services sur un marché. Elles ne sont pas non plus considérées comme des entreprises.
La réglementation européenne d’encadrement des aides d’État s’applique donc uniquement aux subventions aux associations menant des activités « économiques » reconnues d’intérêt général lorsque ce montant dépasse 500 000 euros sur 3 ans. Pour les associations qui ne rentrent pas dans ce champ, pour des raisons de taille ou de nature d’activités, la réglementation nationale s’applique librement.
Pour les activités qui ne sont pas d’intérêt général, les subventions aux activités économiques sont interdites au delà d’un montant de 200 000 euros sur 3 ans (le Paquet Monti Kraus reste en vigueur). En deçà de ce seuil, les subventions sont librement autorisées.
Une loi élargissant la notion de services d’intérêt général
Il est possible de donner une assise législative au travail d’intérêt général des associations, comme d’ailleurs des structures d’économie solidaire, en les faisant reposer sur les droits fondamentaux et non comme simple dérogation aux politiques de concurrence. Une proposition de loi portant sur les services sociaux d’intérêt général avait été déposée en janvier 2010. Il est proposé de reprendre cette proposition de loi en étendant la notion de service social d’intérêt général à l’ensemble des actions « visant à répondre aux besoins vitaux de l’être humain et à lui permettre de bénéficier de ses droits fondamentaux ».
Reconnaître la nécessité d’un financement du projet associatif
L’État reconnaît l’importance pour une association de développer un projet associatif au service de ses membres et de l’intérêt général, et sa contribution à la vie sociale, culturelle, démocratique du pays et des territoires. De ce fait, il peut être légitime pour l’État et les collectivités de contribuer au financement de la réalisation d’un projet associatif dès lors que celui-ci contribue à l’intérêt général et comporte des objectifs clairs et évaluables, qualitativement ou quantitativement. On évitera de parler de subventions de fonctionnement pour parler de subventions au projet associatif (et non aux projets associatifs, ce qui est bien différent).
Le subventionnement du projet associatif ne doit pas conduire à exclure tout financement de projets ou d’opérations particulières, dès lors que ces actions entrent dans l’objet statutaire de l’association.
Conventions pluriannuelle d’objectifs
Le recours aux conventions pluriannuelles d’objectifs doit être préféré aux conventions conclues sur une base annuelle, dès lors que l’aide de l’Etat à une association consiste à soutenir son action dans la durée. Les modalités de financement des associations sur une base pluriannuelle ont été définies par la circulaire du 1er décembre 2000 relative aux conventions cadres passées avec certaines associations soumises au régime de la loi de 1901 et subventionnées par l’Etat. Le bilan de ces dispositions a montré qu’un tel dispositif a permis de consolider l’activité des associations bénéficiaires en leur donnant davantage de temps pour se consacrer à leur objet social.
Les conventions annuelles ou pluriannuelles d’objectifs constituent un mandatement par lequel l’autorité publique reconnaît la contribution de l’association à l’intérêt général à travers son projet associatif ou à travers une action particulière.
Diversification des modèles de conventions.
Il convient de revenir sur le modèle unique de conventions pluriannuelles mises en place par la circulaire du 18 décembre 2010, modèle adapté de fait aux situations les plus complexes et dissuasif pour les petites et moyennes associations. Des modèles simplifiés de conventions seront établis en fonction du montant des aides accordées, de la nature des activités et du dialogue préalable entre l’association et les administrations concernées. Ces modèles de conventions seront centrés sur le projet associatif plus que sur la structure.
Continuité des subventionnements
En principe, le versement d’une nouvelle subvention est subordonné à l’évaluation de la réalisation des actions subventionnées antérieurement. Cependant, lorsque les décisions de subventionnement interviennent après le premier juin de l’année civile, l’action ne peut pas être terminée au cours de l’année civile. Les services instructeurs se contenteront dans ce cas une note précisant l’état d’avancement de l’action au cours afin de ne pas créer des ruptures de financement pour l’année suivante.
Simplifications administratives et adaptation des règles la diversité des situations associatives
La complexification croissante des procédures administratives et un obstacle parfois insurmontable pour les petites associations. Les services de l’État seront invités à proposer des simplifications qui pourront être examinées lors de chaque conférence annuelle, en lien avec la Commission pour les simplifications administratives.
– Accélération des modalités de versement des subventions.
– Assouplissement de la règle de l’antériorité.
– Les pièces administratives relatives à la structure seront rendues disponibles par l’association sur Internet.
– Redéfinition de l’évaluation
[1] Le protocole N° 26 annexé au traité de Lisbonne précise que « Les dispositions des traités ne portent en aucune manière atteinte à la compétence des États membres relative à la fourniture, à la mise en service et à l’organisation de services non économiques d’intérêt général »
[2] Source Quelques repères sur les associations en France aujourd’hui, Edith Archambault et Viviane TCHERNONOG, Centre d’Economie de la Sorbonne, CNRS/Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Mars 2012
[3] Source : La France associative en mouvement, octobre 2011, en prenant la moitié des associations disposant d’un budget de 200000 à 500000 euros par an et la totalité de celles qui dépassent ce seuil.